Parmi toutes les étapes de préparation de mon dernier roman, la conception de la couverture de Julia et Mrs Carpenter fut celle qui m’a le plus transporté. D’abord, parce que pour la première fois, je me suis débrouillée seule pour la réaliser, même si elle reflète un travail collectif. Ensuite, parce l’image que j’ai trouvée reflète parfaitement toute l’atmosphère du roman.
Le Pays du Coquelicot
Dans ce roman, le décor joue un rôle important dans l’histoire. Il fallait donc que la couverture de Julia et Mrs Carpenter reflète ce décor.
J’aurais pu me promener au cœur du Pays du Coquelicot, l’endroit du département de la Somme où j’ai choisi de situer cette histoire. Cela ne m’aurait posé absolument aucun problème. Au contraire, cela aurait été un vrai plaisir.
Mais je voyais dans ce type d’image deux inconvénients.
D’abord, à moins d’être un amoureux de la Picardie exilé dans une autre région ou passionné d’histoire de la Première Guerre Mondiale, les paysages du Pays du Coquelicot sont loin d’être reconnaissables par un grand nombre de personnes.
Ensuite, Julia et Mrs Carpenter n’est ni un roman historique, ni un roman du terroir. Le décor fait écho aux sentiments des personnages. Il vient nourrir la relation au passé qu’entretient Mrs Carpenter. Ce roman évoque l’histoire de la Première Guerre Mondiale, mais ça s’arrête là.
Il me fallait donc une image qui évoque le Pays du Coquelicot sans le montrer. Je voulais donc absolument que des coquelicots soient présents sur l’image de couverture. J’avais donc trouvé le premier mot clé que je souhaitais explorer.
Mais bien entendu, mes réflexions ne se sont pas arrêtées là.
La relation entre Julia et Mrs Carpenter
Avec un titre centré sur les deux personnages principaux, vous vous doutez, amis lecteurs, que je souhaitais voir figurer des personnes sur la couverture de Julia et Mrs Carpenter.
Sauf que je ne voulais pas donner une représentation physique à Julia et Mrs Carpenter.
Dans ma tête, elles ont un visage, une allure et un style vestimentaire, des gestes reconnaissables et leurs visages sont très expressifs. Mais je suis restée très vague dans leurs descriptions.
Voici les quelques éléments de description de Mrs Carpenter.
A aucun moment, les yeux bleu délavé de Mrs Carpenter n’avaient quitté le visage de Julia ; autant les traits de la vieille dame n’exprimaient rien d’autre qu’une austérité et une certaine distance avec ceux qui l’entouraient, autant ses yeux semblaient plus vivants.
Julia et Mrs Carpenter, chapitres 1 et 2
[…]
Vêtue d’un pantalon et de souliers noirs, la vieille anglaise n’arborait de couleurs dans ses tenues hivernales que par des twin-set assortis de modeste facture. Toujours coiffée du même chignon austère, qui coinçait toutes ses mèches de cheveux blancs sans laisser s’échapper la moindre boucle, aucune trace de maquillage ne venait jamais modifier son visage.
Quand à Julia, je ne la décris pas physiquement. Je parle de son caractère, de ses envies pu de ses peurs, de ses passe-temps. Mais je ne dis rien de son physique.
Ne pas pousser plus loin la description de Julia ou de Mrs Carpenter était un vrai choix. Derrière le portrait de ces deux femmes, j’aborde des sentiments assez universels : la réaction face à la perte d’un proche ; les difficultés à faire face à son passé, à se confier, à espérer ; la puissance de l’amitié…
A côté de l’universalité de ces situations devaient donc se trouver des personnages « passe partout ». Non pas transparents. Mais non identifiables, non assimilables à un visage. Ce qui m’importait, ce n’était pas que vous, amis lecteurs, puissiez identifier Julia ou Mrs Carpenter sur une photographie. Mais que vous puissiez vous attacher à elles parce que leurs émotions, leur douleur, leurs espoirs vous sembleraient vrais. Parce qu’ils vous feraient penser à quelqu’un de votre connaissance.
Pour toutes ces raisons, je ne souhaitais donc pas voir figurer des visages sur la couverture de Julia et Mrs Carpenter.
Cependant, la présence d’une personne était indispensable. Pour les raisons que j’ai déjà évoquées. Mais aussi parce que cette représentation humaine permettait d’introduire l’effet des ombres que peut laisser le passé sur une personne…
Les ombres du passé
Avant de poursuivre ce billet, je dois vous confier une chose, amis lecteurs. Voici la partie de cet article qui a été le plus difficile à écrire. Pourquoi ? Parce qu’il faut que je vous explique pourquoi le passé laisse des traces très (trop) présentes dans le présent de nos personnages principaux. Mais sans vous révéler quoi que ce soit de l’histoire 😉
Julia a connu un deuil violent lorsqu’elle était enfant. A l’époque où se situe le roman, Julia a trente ans. Elle ne s’est jamais débarrassée de la douleur de cette perte. Suite à d’autres déceptions dans ses relations avec les autres, elle a même fait de cette douleur un rempart.
Mrs Carpenter, elle, a perdu sa famille pendant la Seconde Guerre Mondiale. Mais elle s’est relevée de ces évènements horribles. Elle a su trouver la force de reprendre une vie normale, de s’ouvrir aux autres et de chercher à leur faire du bien. C’est elle qui réussira à forcer la muraille que Julia a dressé autour d’elle et qui fera en sorte que la jeune femme fasse à nouveau confiance aux autres.
De cette belle relation d’amitié ressort donc la confiance, mais aussi la transmission et la croyance en l’avenir.
Je voulais que ces notions soient représentées sur la couverture de Julia et Mrs Carpenter. Il y avait plusieurs façons d’imaginer cela : deux paires qui se tiennent avec force, deux paires de main portant ensemble un objet, etc.
Vous savez maintenant tout ce que je voulais faire passer par cette couverture.
Il me restait donc à trouver l’image idéale pour cela.
La version définitive de la couverture de Julia et Mrs Carpenter
Pour la couverture de Julia et Mrs Carpenter, je me suis débrouillée seule. Avec l’expérience acquise avec les parutions de mes deux premiers romans, je me sentais plus confiante pour réaliser cette étape moi-même.
La première étape était donc de chercher des images qui feraient référence aux messages que je voulais faire passer :
- voir deux personnages féminins, mais sans qu’on puisse leur donner un visage.
- montrer l’amitié ou la transmission.
- montrer des coquelicots.
J’ai donc cherché des images qui montreraient une silhouette de dos. Idéalement, celle d’une jeune femme et d’une dame âgée. Mais cette recherche fut infructueuse.
J’ai aussi cherché des images montrant des paires de mains. Cette recherche m’a fourni une image qui m’a beaucoup intéressée : deux paires de mains tenant ensemble un bouquet de fleurs rouges. J’y voyais tous les messages que je souhaitais faire passer. Mais il manquait encore un petit quelque chose.
C’est alors que je suis tombée sur cette photo, celle qui est finalement devenue la couverture de Julia et Mrs Carpenter.
Non seulement cette image répondait à tous mes souhaits, mais elle apportait ce petit quelque chose en plus. Qui est cette femme ? Est-ce Julia ou est-ce Mrs Carpenter ? A qui va-t-elle apporter ses fleurs ? Ce petit côté mystérieux me convenait très bien, et au roman aussi. Pourquoi ?
Désolée, amis lecteurs, mais cette fois-ci je ne peux pas vous dire pourquoi 😉 Si vous tenez vraiment à connaître les réponses à ces dernières questions, vous n’avez qu’un seul moyen à votre disposition : vous plonger dans ce roman et découvrir ce qu’il se passe une fois passé la couverture de Julia et Mrs Carpenter…
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Très intéressant de voir comment le choix d’une couverture se travaille. J’ai toujours aimé celle-ci particulièrement et c’est vrai qu’elle fait écho à beaucoup d’éléments du roman…chut…😉