Atelier d’écriture : Tenir la vie à deux mains

Nouvelle semaine, nouvelle participation à l’atelier d’écriture du blog Bricabook de Leiloona.

Voici la photo qui était proposée cette semaine, un cliché de Emma Jane Browne.

Photo de Emma Jane Browne

© Emma Jane Browne

Voici le texte que cette photo m’a inspiré.

“Tiens ton bâton fermement, à deux mains. Garde les deux pieds accrochés au sol, tu trouveras ton équilibre. C’est la base. Si tu ne maîtrises pas la base, tu ne pourras pas progresser. Si tu veux avancer, maîtrise la base.”

Son entraîneur lui répétait ce discours à chaque séance.
Elle visait bas, il la voyait aller loin.
Elle doutait d’elle, il croyait en sa victoire.
Elle freinait sa progression, il la poussait à aller plus vite dans son apprentissage.
Elle n’imaginait rien, il pensait qu’elle réussirait.

Les jours où elle doutait, il lui faisait reprendre le bâton. “Mais ça n’a rien à voir avec ma discipline.” “Peut-être, mais c’est la base.”

“La vie est difficile”, dit-elle un jour ; pas par découragement, mais par peur.

“La vie, c’est comme ce bâton. Si tu ne la tiens pas à deux mains, tu vas la laisser tomber. Si tu n’es pas fermement accrochée à ta base, tu perdras l’équilibre.”
“Et quelle est ma base ?”
“Toi. Sois accrochée à toi et garde ton équilibre. Tu avanceras dans la vie sans heurt, sans difficulté.”

Il n’était plus son entraîneur depuis longtemps, mais elle avait conservé en mémoire ses paroles. Depuis, elle se les répétait sans cesse. Quand elle apprenait un nouveau geste, une nouvelle technique, elle en faisait son leitmotiv pour réussir à le maîtriser. Quand elle doutait ou qu’elle avait un coup de blues, elle se les rappelait, comme une aide pour pouvoir se relever. Elle s’en était fait un mantra protecteur, au point de pouvoir imaginer que ces paroles avaient pris forme humaine.

Elle ne savait pas ce qu’il était devenu. Mais elle savait ce qu’elle ne serait pas devenue sans lui. Elle espérait qu’il la suivait, de loin.

Elle tressaillit. Quelqu’un avait posé sa main sur son épaule, la tirant de sa rêverie. Elle prit soudain conscience du vacarme environnant, des lumières aveuglantes et de la foule rassemblée. On l’invitait à avancer. Une voix enjouée résonna dans les hauts-parleurs : “Pour la médaille d’or, représentant la France, …”. En grimpant les marches, elle sourit aux cinq anneaux entrelacés qui lui faisaient face.

Elle avait réussi.

10 réflexions sur “Atelier d’écriture : Tenir la vie à deux mains”

  1. Bonjour!..Tu permets que je te l’emprunte aussi? ….Il me plaît bien ce mantra avec son air de rien qui fait tout en fait! !!!…Je suis confuse d’avouer que par abondance de textes à lire je n’étais pas encore venue chez toi. …je le regrette car j’aime beaucoup ton style et ce matin je fais une belle découverte. …Donc voilà tu as gagné une lectrice! !!!
    Je retiens cette phrase magnifique “Elle ne savait pas ce qu’il était devenu, mais elle savait ce qu’elle ne serait pas devenue sans lui. “….Elle me parle beaucoup car j’ai aussi des rencontres -socles comme celle ci dans ma vie. ..
    J’aime ta façon d’écrire, simple, élégante, sobre mais évocatrice. …

    1. Merci infiniment Bénédicte pour ton commentaire 🙂 Si je ne me trompe pas, tu es la Bénédicte qui s’est lancée dans les haïkus pour les ateliers d’écriture de Bricabook ? J’aime aussi beaucoup ce que tu écris. J’espère un jour arriver à l’écriture de haïkus aussi inspirant et reposant que les tiens 😉
      Ce mantra est “libre de droits” comme on dit aujourd’hui. Ca me flatte bcp tous ces commentaires qui traduisent l’effet que ce mantra peut avoir sur les personnes qui l’ont lu. Le pouvoir des mots est tellement infini…
      Des rencontres-socles, on a tous dû en avoir. Il faut savoir graver ce que ces personnes nous ont apporté et ne pas l’oublier.
      Merci aussi pour ton compliment 🙂 Avec ces ateliers d’écriture proposés par Leiloona sur son blog, je me suis découvert d’autres horizons d’écriture et des styles d’écriture que je ne me soupçonnais pas encore ! Les différentes appréciations de mes textes sont très encourageantes pour la suite 🙂

  2. Je n’ai pas encore lu ton texte, mais quel joli titre !

    2 mn plus tard, après lecture : voila un texte qui me fait du bien avant de partir au boulot. Je penserai à toi et j’essaierai de m’accrocher à mon travail qui consiste à raccrocher des personnes âgées à la vie. Ou de savoir parfois les laisser décrocher.
    Tu vois la puissance évocatrice de ton texte …

    1. Merci bcp Adèle pour ce commentaire, qui lui aussi a une grande puissance évocatrice. Exercer un métier où on essaye soi-même de “raccrocher des personnes âgées à la vie”, comme tu l’écris, mérite son propre mantra. Je suis heureuse et flattée de t’avoir fait du bien avec ce texte 🙂

    1. C’est vrai qu’on tente parfois de rester en équilibre alors que le sol se dérobe sous nos pieds. Dans ce cas, il faut espérer avoir de bons amis qui, depuis la rive, peuvent nous lancer une corde pour nous aider à revenir rapidement sur un sol plus stable 🙂

    1. Merci beaucoup Sabine pour ton commentaire et pour ton compliment 🙂 En l’écrivant, je me suis rendue compte que je réussissais à formaliser quelque chose que j’essaye de mettre en pratique pour moi-même. Ce mantra, ce sera désormais le mien aussi 🙂

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